Aller au contenu

Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/231

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
221
année 1772.

J’ajouterai que c’est à Thorn que Copernic trouva le vrai système du monde, que l’astronome Hévélius était de Dantzick, et que par conséquent Thorn et Dantzick doivent vous appartenir. Votre Majesté aura la générosité de nous envoyer du blé par la Vistule quand, à force d’écrire sur l’économie, nous n’aurons au lieu de pain que des opéras-comiques, ce qui nous est arrivé ces dernières années.

C’est parce que les Turcs ont de très-bons blés et point de beaux-arts que je voulais vous voir partager la Turquie avec vos deux associés[1]. Cela ne serait peut-être pas si difficile, et il serait assez beau de terminer là votre brillante carrière : car, tout Suisse que je suis, je ne désire pas que vous preniez la France.

On prétend que c’est vous, sire, qui avez imaginé le partage de la Pologne ; et je le crois, parce qu’il y a là du génie, et que le traité s’est fait à Potsdam.

Toute l’Europe prétend que le grand Grégoire[2] est mal avec mon impératrice. Je souhaite que ce ne soit qu’un jeu. Je n’aime point les ruptures ; mais enfin, puisque je finis mes jours loin de Berlin, où je voulais mourir, je crois qu’on peut se séparer de l’objet d’une grande passion.

Ce que Votre Majesté daigne me dire à la fin de sa lettre[3] m’a fait presque verser des larmes. Je suis tel que j’étais, quand vous permettiez que je passasse à souper des heures délicieuses à écouter le modèle des héros et de la bonne compagnie. Je meurs dans les regrets ; consolez par vos bontés un cœur qui vous entend de loin, et qui assurément vous est fidèle.

Le vieux Malade.
8683. — À M. BERTRAND.
18 novembre.

Un vieillard malade, mon cher philosophe, a à peine la force de dicter que, s’il peut reprendre un peu de santé, il emploiera tous les moments de vie qui lui resteront à chercher l’occasion de vous servir. Le temps n’est pas favorable, parce que ce n’est pas celui où les Anglais voyagent. Je me croirais infiniment heureux si je pouvais contribuer à placer monsieur votre fils avan-

  1. Les cours d’Autriche et de Russie.
  2. Le comte Orlof ; voyez la lettre 8702.
  3. No 8667.