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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/305

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année 1772.

par les chaudronniers de la littérature. Pourquoi l’auteur ne les redonnerait-il pas avec toutes leurs parties nobles, et les notes qui doivent en faire la sauce ?

On dit que vous réimprimez le Commentaire de Corneille fort augmenté[1]. Vous ferez bien. Je ne trouve de tort que de n’en avoir pas assez dit. Les pièces de Corneille me paraissent de belles églises gothiques. Vale, et ama tuum Bertrand.

8753. — À M. D’ALEMBERT.
1er février.

Vous savez, mon cher Bertrand, la déconvenue arrivée à Raton. Un fripon du tripot de la Comédie française[2] a vendu à un fripon de la librairie, nommé Valade, une partie des Lois et constitutions de Minos, et y a joint une autre partie de la façon de quelque bonne âme sa complice. On débite cette rapsodie hardiment sous mon nom : ainsi on vole les comédiens, et on me rend ridicule. C’est assurément le plus petit malheur qui puisse arriver ; cependant je vous prie de dire à vos amis que je ne suis pas tout à fait aussi impertinent que Valade le prétend. Il n’y aura que Fréron qui gagnera à tout cela il vendra cinq ou six cents de ses feuilles de plus. J’ai demandé justice à M. de Sartines[3] contre ce brigandage ; mais je n’ai pas l’honneur de le connaître, et l’on fait toujours mal ses affaires de cent trente lieues loin ; mais je compte sur la justice que vous et vos amis me rendront.

La littérature est devenue un bois de voleurs ; cela est digne du siècle. Soutenez ce malheureux siècle tant que vous pourrez, et aimez-moi.

Raton.
8754. — À M. DE CHABANON[4].
1er février.

I nunc, et versus tecum meditare canoros.


Mon cher ami, il m’arrive une aventure digne de ce siècle, la lie des siècles. Je ne sais quel est le comédien, ou le souffleur, ou l’ouvreur de loges, qui s’est avisé de travestir ma tragédie

  1. Voyez lettre 8744.
  2. Ce n’était pas quelqu’un du tripot de la Comédie française : c’était Marin.
  3. La lettre à M. de Sartines, lieutenant général de police, manque.
  4. Éditeurs, de Cayrol et François.