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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/339

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année 1772.

raison que je serai probablement mort avant que vous ayez gagné cinq ou six batailles contre les Turcs.

Je me suis borné, dans ma dernière lettre[1], à demander la protection de Votre Majesté impériale, pour savoir quelles précautions on prend dans votre zone illustre et glaciale pour assurer les levées des terres et des murailles contre les efforts de la glace ; je me suis restreint à la physique, les affaires politiques ne sont pas de ma compétence.

On dit que, parmi les Français, il y a des Welches qui sont grands amis de Moustapha, et qui se trémoussent pour embarrasser mon impératrice ; je ne veux point le croire ; je ne suis qu’un pauvre Suisse qui se défie de tous les bruits qui courent, et qui est incrédule comme Thomas Didyme l’apôtre. Mais je crois fermement à votre gloire, à votre magnificence, à la supériorité que vous avez acquise sur le reste du monde depuis que vous gouvernez, à votre génie noble et mâle : j’ose croire aussi à vos bontés pour moi. Je me mets aux pieds de Votre Majesté impériale pour le peu de temps que j’ai encore à vivre : agréez le profond respect et le sincère attachement du vieux malade de Ferney.

8792. — À M. D’ALEMBERT.
27 mars.

Mon très-aimable Bertrand, votre lettre a bien attendri mon vieux cœur, qui, pour être vieux, n’en est pas plus dur. Je ne sais pas bien positivement si je suis encore en vie ; mais en cas que j’existe, c’est pour vous aimer.

Le gros Gabriel Cramer, pendant ma maladie, a imprimé un petit recueil dans lequel vous trouverez d’abord les Lois de Minos, précédées d’une épître dédicatoire ; et, si la page 8 de cette épître dédicatoire ne vous plaît pas, je serai bien attrapé[2].

Je sais d’ailleurs que Raton aime Bertrand depuis trente ans, et que Bertrand pardonnera à une liaison de plus de cinquante.

Après la pièce sont des notes que probablement on ne réimprimera pas dans Paris, tant elles contiennent de vérités. Vous trouverez dans ce recueil[3] la seule bonne édition de l’Épître à

  1. Ce n’est pas dans la dernière, No 8770, mais dans l’avant-dernière. No 8723.
  2. Voyez, dans l’épître dédicatoire des Lois de Minos (tome VII, page 170), l’alinéa qui commence par ces mots : C’est à vous de maintenir.
  3. Toutes les pièces que Voltaire énumère ici sont à la suite des Lois de Minos, dans l’édition dont il est parlé, tome VII, page 166.