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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/523

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Je n’aime point du tout, il est vrai, votre métier de héros, mais je le révère ; ce n’est point à moi de juger de la Tactique de M. Guibert. Je ne m’entends point à ces belles choses ; je sais seulement qu’il vous regarde, avec raison, comme le premier tacticien ; et moi j’ajoute, comme le premier politique, car vous venez d’acquérir un beau royaume, sans avoir tué personne ; et non-seulement vous voilà pourvu d’évêchés et d’abbayes, non-seulement vous voilà général des jésuites, après avoir été général d’armée, mais vous faites des canaux comme à la Chine, et vous enrichissez le royaume que vous vous êtes donné par un trait de plume. Que vous reste-t-il à faire ? rien autre chose que de vivre longtemps pour jouir.

Comme Votre Majesté recevra probablement mon petit paquet aux bonnes fêtes de Noël, et que le dieu de paix va naître avant qu’il soit trois semaines, je me recommande à lui afin qu’il obtienne ma grâce de vous, et que vous me pardonniez toutes les pouilles que j’ai dites à Votre Majesté, et la haine cordiale que j’ai pour votre métier de César. Ce César, comme vous savez, pardonnait à ses ennemis quand il les avait vaincus : et vous aurez pour moi la même clémence, après vous être bien moqué de moi.

Le vieux malade de Ferney, qui s’égaye quelquefois dans les intervalles de ses souffrances, se met à vos pieds avec cinq ou six sortes de vénérations pour vos cinq ou six sortes de grands talents, et pour votre personne qui les réunit.

8993. — À M. PROST DE ROYER[1].
À Ferney, 8 décembre.

Monsieur, on me propose d’avoir l’honneur et le plaisir de vous écrire. C’est en faveur du sieur Porami, régisseur de ma terre de Ferney, et du sieur Perrachon, marchand établi dans ma petite colonie, contre un banqueroutier nommé Cretet, qui s’est sauvé des prisons de Lyon, et contre les créanciers de ce banqueroutier.

Perrachon soutient qu’étant à Lyon en 1772, il fit des marchés avec ce Cretet et lui paya ses marchandises, de quoi la preuve est au procès. Perrachon dit qu’il fit adresser les marchandises par lui achetées et payées, sous le nom du sieur Wagnière, mon secrétaire, parce qu’alors ledit Perrachon était à


  1. Éditeurs, de Cayrol et François.