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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/579

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Je vous écris hardiment par la poste, parce qu’il n’y a rien dans cette lettre, ni dans aucune autre de mes lettres, qui puisse alarmer le gouvernement ; il n’y a que quelques passages qui pourraient alarmer Marin ; mais, s’il y a des curieux, ils ne lui en diront mot.

Je change d’avis ; je m’adresse à M. Bacon, substitut du procureur général. Il vous fera tenir ma lettre.

Mille tendres respects à Mme d’Argental.

9055. — À M. LE MARQUIS DE CONDORCET[1].
À Ferney, 25 février.

Le vieux malade, monsieur, plus vieux et plus malade que jamais, presque aussi sourd que La Condamine, presque aussi aveugle que Mme du Deffant, vous écrit tout uniment par la poste, comme vous l’avez voulu, et comme vous avez eu raison de le vouloir. La voie dont il se servait[2] était trop dangereuse. Vous me l’avez dit, et je l’ai bien éprouvé.

Je vous dois mille remerciements. J’en ai dit quelque chose à votre digne confrère en secrétariat[3] ; mais je n’ai pas osé lui expliquer tout le problème. Je me flatte qu’il est aussi bien instruit que vous, et qu’il a trouvé l’équation tout d’un coup.

Voilà de ces choses qu’on ne devrait pas attendre dans la république des lettres. Que d’infamies dans cette république ! Il faut espérer que les deux secrétaires unis mettront tout sur un meilleur pied. Je suis un peu victime des brigands soi-disant lettrés ; mais je me console avec vous.

Le quatrième mémoire de Beaumarchais ne laisse pas de donner de grandes lumières sur des choses dont vous m’aviez déjà parlé, et dont je vous prierais de m’instruire si vos occupations vous le permettaient. Ce Beaumarchais justifie bien les défiances que vous aviez[4]. Malheureusement j’ai eu trop de confiance. Pour surcroît de peine, il faut que je me taise. Cela gêne beaucoup, quand on a de quoi parler et qu’on aime à parler.

Ne vous gênez pas, je vous en prie, avec moi, si vous savez

    comme la plupart de ceux qui les ont aimées, n’a jamais eu le tort honteux de lever la main sur aucune. (Note du correspondant général de la Société littéraire typographique.) (K.)

  1. Œuvres de Condorcet, tome Ier ; Paris, 1817.
  2. Celle de Marin.
  3. D’Alembert.
  4. Contre Marin.