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94 AVERTISSEMENT.

ne 8L> jette dans le hùclier que pour ne pas épouser Cassandre, puisque (.assandie se tue de désespoir d’avoir perdu Olympie. Or, dès le premier acte, iauteur les a jilacés tous deux dans des circonstances qui, rendant leur union impossible, ne permettent pas qu’on s’intéresse à un amour dont il n’y a rien à espérer. »

Celte tragCdie est celle peut-être que Voltaire, dans sa vieillesse, prit le plus à cœur. Il faut voir, dans la correspondance de l’année 1766, (juelle joie lui cause le succès d’Olympie sur le théâtre de Genève ; le 3 novembre il écrit à d’Argental : « La troupe de Genève, qui n’est pas absolument mauvaise, se surpassa hier en jouant Oly ? npie ; elle n’a jamais eu un si grand succès. La foule (jui assistait à ce spectacle le redemanda pour le lendemain à grands cris. » Le 7 novembre, il écrit au même : « On est toujours fou d’Olympie à Genève, on la joue tous les jours. Le bûcher tourne la tête ; il y avait beaucoup moins de monde au bûcher de Servet, quand vingt-cinq faquins le liront brûler. »

Il y a, dans les Mémoires rédigés par M. Coste sous le nom de Marie- Françoise Dumesnil, en réponse aux Mémoires d’IIippolyte Clairon, une anecdote à propos de cette dernière actrice et d’Olympie. Louis XV avait témoigné l’envie de voir les Grâces de Saint-Foix. La Comédie est mandée à Versailles pour jouer Olympie, et les Grâces comme petite pièce. Mais le roi avait conseil à neuf heures ; il ne fallait pas perdre de temps. M"*" (Clairon jouait Olympie. Les actrices, notamment M"* D’Oligny, qui jouaient dans les Grâces., devaient faire partie du cortège d’Olympie ; mais afin qu’elles n’eussent pas à changer de costume après la grande pièce, et que la petite pût commencer tout de suite, M. de La Ferlé, intendant des menus-plaisirs, décida que les comédiennes seraient remplacées dans le cortège par des choristes de l’Opéra. M*- Clairon : « Si l’on change quelque chose à la pompe théâtrale d’Olympie, je ne jouerai point. » Et, se retournant vers M"* d’Oligny et ses compagnes : « Et vous, mesdemoiselles, je vous défends de vous laisser remplacer. » En vain ]\I. de La Ferlé insiste ; M" Clairon répèle son îdtimalîvii : «.le ne jouerai point. » Il fallut laisser les comé- diennes dans son cortège. La tragédie traîne en longueur. Louis XV^ s’impatiente : il tire sa montre ; neuf heures sont sonnées ; il se lève et sort en disant à haute voix : « On m’avait promis les Grâces. » Tel était le ton qu’avaient pris, même à la cour, les fameuses actrices de cette époque.

Et qui faillit être puni ? Ce fut Fréron, qui inséra dans son journal une plainte de Saint-Foix, et qui n’évita d’aller en pi ison que i>ar l’intercession du roi de Pologne.