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496 DISCOURS IlISTORKME ET CRITIOUE.

est une graud’inèrc de près de cent ans’ ; le jeune Joas est son pelit-fils, son uniijue héritier ; elle n’a plus de parents ; son intérêt est de relever et de lui laisser la couronne ; elle déclare elle-même qu’elle n’a pas d’autre intention. C’est une absurdité insupportable de supposer qu’elle veuille élever Joas chez elle pour s’en défaire ; c’est pourtant sur cette absurdité que le fanatique Joad assassiné sa reine.

« Je l’appelle hardiment fanatique, puisqu’il parle ainsi à sa femme (à cetle femme assez inutile dans la pièce), lorsqu’il la trouve avec un prêtre qui n’est pas de sa communion :

Quoi ! fille de David, vous parlez à ce traître - ! Vous souffrez qu’il vous parle, et vous ne craignez pas Que, (lu fond de l’abîme entrouvert sous ses pas, II ne sorte à l’instant des feux qui vous embrasent, Ou (lu’en tombant sur lui ces murs ne vous écrasent !

« Je fus très-content du parterre qui riait de ces vers, et non moins content de l’acteur ^ qui les supprima dans la représentation suivante. Je me sentais une horreur inexprimable pour ce Joad ; je m’intéressais vivement à Athalie ; je disais d’après vous-même :

Je pleure, hélas ! de la pauvre Atlialio,

Si méchamment mise à mort par Joad *.

« Car pourquoi ce grand-prêtre conspire-t-il très-imprudemment contre la reine ? pourquoi la trahit-il ? pourquoi l’égorger-il ? C’est apparemment pour régner lui-même sous le nom du petit Joas ; car quel autre que lui pourrait avoir la régence sous un roi enfant dont il est le maître ?

« Ce n’est pas tout ; il veut qu’on extermine ses concitoyens ; qu’on se baigne dans leur sang sans ho)-rcur ; il dit à ses prêtres :

Frappez et Tyriens et même Israélites *.

1. Voyez page 128.

’2. Athalie, acte III, scène v.)

{. C’était Beaubourg (Pierre Tronchon, sieur de), mort, en 1725, à soixante-trois

ans.

4. L’épigramme de Racine sur la. Judith de Boyer se termine par ces vers ;

Je pleuro, hclas ! pour ce pauvre Hulopherne Si méchamment mis a mort par^Judilh.

(Œuvres complètes [de Racine, édition do MM. Saint-Marc Girardin et Louis Molatid, tome V, p. 38Î).)

5. Athalie, actti IV, scène ui.