J’ai commencé par des propos galants.
Je m’attendais aux communes alarmes,
Aux cris perçants, à la colère, aux larmes ;
Mais qu’ai-je ouï ! la fermeté, l’honneur,
L’air indigné, mais calme avec grandeur :
Tout ce qui fait respecter l’innocence
S’armait pour elle, et prenait sa défense.
J’ai recouru, dans ces premiers moments,
À l’art de plaire, aux égards séduisants,
Aux doux propos, à cette déférence
Qui fait souvent pardonner la licence ;
Mais pour réponse, Acanthe à deux genoux
M’a conjure de la rendre chez vous ;
Et c’est alors que ses yeux moins sévères
Ont répandu des pleurs involontaires.
Que dites-vous ?
Me les cacher de sa charmante main :
Dans cet état, sa grâce attendrissante
Enhardissait mon ardeur imprudente ;
Et, tout honteux de ma stupidité,
J’ai voulu prendre un peu de liberté.
Ciel ! comme elle a tancé ma hardiesse !
Oui, j’ai cru voir une chaste déesse,
Qui rejetait de son auguste autel
L’impur encens qu’offrait un criminel.
Ah ! poursuivez.
Qu’ayant vécu presque dans la misère,
Dans la bassesse, et dans l’obscurité,
Elle ait cet air et cette dignité,
Ces sentiments, cet esprit, ce langage,
Je ne dis pas au-dessus du village,
De son état, de son nom, de son sang,
Mais convenable au plus illustre rang ?
Non, il n’est point de mère respectable
Qui, condamnant l’erreur d’un fils coupable,
Le rappelât avec plus de bonté
À la vertu dont il s’est écarté ;
N’employant point l’aigreur et la colère,
Fière et décente, et plus sage qu’austère.
De vous surtout elle a parlé longtemps…
De moi ?…
Votre vertu, qui devait, disait-elle,
Être à jamais ma honte ou mon modèle.
Tout interdit, plein d’un secret respect,
Que je n’avais senti qu’à son aspect,