Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome7.djvu/424

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Elle vous attendait pour quitter Syracuse :
Les peuples empressés au bord de l’Aréthuse,
Pleurant de son départ, admirant sa beauté,
Chargeaient le ciel de vœux pour sa prospérité.
Tout à coup Polycrate, écartant tout le monde,
Paraît comme un éclair qui fend la nuit profonde :
Il se saisit d’Ydace : et d’un bras détesté,
Il arrache sa proie au peuple épouvanté.
Argide seul, Argide entreprend sa défense ;
Sa fermeté s’oppose à tant de violence :
L’infâme ravisseur, un poignard à la main,
Sur ce jeune héros s’est élancé soudain
Argide a combattu ; mais avec quel courage !
On croyait voir un dieu contre un monstre sauvage.
Polycrate vaincu tombe et meurt à ses pieds :
Les cris des citoyens jusqu’au ciel envoyés
En portent à l’instant la nouvelle à son père ;
Tandis qu’en son triomphe oubliant sa colère,
Le vainqueur attendri secourt en gémissant
Le farouche ennemi qui meurt en menaçant.

YDASAN.

Tu ne m’as rien appris qui ne nous soit propice.
Nous sommes tous vengés.

LA PRÊTRESSE.

                                         Le ciel à fait justice ;
C’est un tyran de moins dans nos calamités.

YDASAN.

Quittons ces lieux, marchons… Qu’ai-je à craindre ?

ÉGESTE, l’arrêtant.

                                                                    Écoutez.
Le roi, qui dans ce fils mit sa seule espérance,
Accourt sur le lieu même, en nous criant : Vengeance !
Mon fils dénaturé vient d’égorger mon fils !
Ses farouches soldats s’assemblent à ses cris ;
Le peuple se disperse, et fuit d’un pas timide.
Agathocle éperdu fait arrêter Argide ;
On saisit votre fille, et, dans son trouble affreux,
Le roi désespéré vous a proscrits tous deux.

YDASAN.

Ma fille, ton seul nom déchire mes entrailles !
J’espérais de mourir dans les champs de batailles :
Sous le fer des bourreaux allons-nous expirer ?…