Page:Voragine - Légende dorée.djvu/524

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de nouveau les dangers de la louange humaine, quitta son compagnon et s’enfonça encore dans le désert, où il eut le bonheur de trouver une grotte auprès d’une source. Il y eut pour nourricière une biche qui, à de certaines heures, venait lui donner son lait.

Or, un jour, les fils du roi, qui chassaient par là, virent cette biche et la poursuivirent avec leurs chiens. Effrayée, elle se réfugia aux pieds de saint Gilles. Et celui-ci, étonné de ses cris, sortit de sa cellule et entendit les chasseurs. Il demanda alors à Dieu que fût sauvée la bête qu’il lui avait donnée pour nourricière. Et en effet aucun des chiens n’osait s’approcher de la biche. La nuit étant proche, les chasseurs s’en revinrent chez eux. Et le lendemain, de nouveau, ils durent rentrer chez eux sans avoir pris la biche. Ce qu’apprenant, le roi se rendit sur les lieux avec l’évêque et une foule de chasseurs. Et comme, de nouveau, les chiens refusaient d’approcher, un des chasseurs, par accident, blessa d’une flèche le saint, qui demandait grâce pour la biche. Après quoi les chasseurs se frayèrent un chemin jusqu’à la grotte, aperçurent un vieillard en habit monacal avec une biche étendue à ses pieds. Le roi et l’évêque s’avancèrent alors vers lui, lui demandèrent qui il était, d’où il était venu, comment il avait pu arriver à un endroit aussi sauvage, et enfin par qui il avait été blessé. Puis, lui ayant demandé pardon de cette blessure dont ils étaient cause, ils lui donnèrent des remèdes pour la guérir, en même temps que de nombreux présents. Mais le saint ne voulut même pas jeter les yeux sur les présents ni sur les remèdes. Bien plus, sachant que la vertu devenait plus parfaite dans la maladie, il pria Dieu de ne plus recouvrer la santé aussi longtemps qu’il vivrait.

Le roi, cependant, lui fit de fréquentes visites, pour recevoir de lui l’aliment spirituel. Et toujours il lui offrait des trésors, et toujours le saint refusait de les accepter. Il. conseilla enfin au roi d’employer plutôt ces trésors à construire un monastère, où serait pratiquée dans toute sa rigueur la discipline monastique. Et le roi suivit son conseil ; mais, quand le monastère fut cons-