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Page:Voyages de Francois Bernier (éd. 1710), vol. 1.pdf/119

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du grand Mogol.

pourquoi taire plus long-temps l’étrange fortune d’Aureng-Zebe & l’incroyable conjoncture qui va remettre en ſi bon état des affaires déſeſperées ? Sultan Sujah, qui n’étoit pas plus aviſé que Dara, fit la même faute, il ne fut pas plûtôt deſcendu de deſſus fon Elephant, que l’Armée ne le voyant plus, fut épouvantée, dans la croyance qu’il y avoit de la trahison, qu’on l’avoit pris ou tué, & ſe débanda ſans remede, comme celle de Dara à la bataille de Samonguer, la déroute fut ſi grande, que le Sultan fut bien-heureux de ſe pouvoir fauver.

Jeſſomſeingue entendant ces étranges nouvelles, & voyant bien qu’il ne faiſoit pas là trop bon pour lui, ſe contenta de ce qu’il avoit pillé, & s’en alla en diligence droit en Agra pour de là paſſer en ſes Terres ; le bruit étoit déja en Agra qu’Aureng-Zebe avoit perdu la bataille ; qu’il étoit pris avec l’Emir-Jemla, & que Sultan Sujah les amenoit priſonniers ; juſques là que Chah-heſt-kan, qui étoit le Gouverneur de la ville & Oncle d’Aureng-Zebe, voyant aux portes de la ville Jeſſomſeingue, dont il avoit apris la trahiſon, & deſeſperant déja de ſa vie, avoit pris dans la main une coupe de poiſon

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