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Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t1, 1905, trad. Khnopff.djvu/178

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la ville et allai droit aux Alpes, qui, fières et belles, allongeaient leur chaîne devant moi. Je réfléchis beaucoup. Je rentrai, le soir, dans la cité des lagunes, fatigué, et me remémorai la principale impression de cette excursion. J’étais assez mélancolique, de garder uniquement le souvenir de la poussière et des chevaux misérables, que j’avais rencontrés de nouveau. Tristement je regardais mon Grand Canal muet. « De la poussière et de pauvres, misérables chevaux martyrisés, eh bien ! ici tu ne les vois pas ; mais il s’en trouve partout dans le monde ! » — J’éteignis ma lampe, invoquai la bénédiction de mon bon ange — et alors s’éteignit aussi pour moi la lumière, — la poussière et la tristesse s’évanouirent !

Le lendemain je me remis au travail. Et puis il me fallut écrire des lettres. Mais j’ai raconté cela déjà. Demain je veux de nouveau travailler. Cependant cette lettre-ci devait d’abord être écrite. Par elle je glisse dans la nuit, où s’éteint la lumière, où s’évanouissent poussière et tristesse. —

Merci, mon enfant, pour m’avoir ainsi accompagné. Est-ce qu’il se trouverait quelqu’un pour ne point m’en féliciter ?

Et mille salutations ! Mille bonnes et belles salutations !

R. W.
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