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16 Septembre.

Je me sens rasséréné et dispos. Ta lettre me réjouit encore toujours. Comme tout ce qui vient de toi est sensé, beau, charmant ! La destinée de nos personnes m’est pour ainsi dire indifférente. Intérieurement tout est si pur, tout s’accorde si parfaitement avec mon être et la nécessité ! Avec ces beaux sentiments, je veux reprendre mon travail et j’attends le piano à queue ! Tristan me coûtera beaucoup d’efforts encore : quand il sera achevé, il me semble qu’alors une merveilleuse période de ma vie aura trouvé sa conclusion et que j’élèverai désormais mon regard vers le monde calmement, clairement, profondément, avec un esprit renouvelé et ce qu’à travers le monde je regarderai, ce sera toi. Telle est la raison pour laquelle j’éprouve un si vif désir de me remettre au travail…

Pour le moment, j’ai une odieuse et interminable correspondance, qui me prend beaucoup de temps ; mais c’est toujours toi qui m’apportes le réconfort et Venise aussi m’assiste merveilleusement. Pour la première fois je respire cette atmosphère toujours égale, pure et délicieuse ; l’aspect féerique de la ville m’entretient dans un état de rêve doucement mélancolique, dont j’éprouve encore et toujours le bienfait. Lorsque, le soir, je vais en gondole au Lido, il y a autour de moi comme cette vibration

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