Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t2, 1905, trad. Khnopff.djvu/101

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chise, l’amertume que je vous confessais souvent disparaît maintenant de plus en plus, pour faire place au mépris absolu. Ce sentiment n’est pas violent ; au contraire, il me donne toujours plus de calme : il suffit que j’aie des rapports avec quelqu’un, à présent, pour que ce sentiment prenne tout à fait le dessus ; et cela épargne beaucoup mon cœur, à présent beaucoup moins facile à blesser : je puis mépriser là où je devenais amer autrefois !…

Aussi je m’exprime de moins en moins et je pense que je ne suis pas là pour être compris par mes actes, et je veux donc espérer du moins qu’un jour quelque chose de mes œuvres du moins sera compris. Mais je vous le dis : seul le sentiment de ma pureté me donne cette force. Je me sens pur : je sais au plus profond de mon être que j’ai toujours travaillé pour autrui, jamais pour moi ; et mes douleurs continuelles sont là pour en témoigner.

Mais la joie ? Plus rien ne me donne de joie ! Et, c’est ma consolation : toute joie où je me surprendrais serait mon accusatrice, et c’en serait fait de mon fier droit au mépris !

Ainsi je puis vous l’écrire aujourd’hui avec une sorte de contentement bizarre : la notification que l’on m’a faite, il y a quelques jours, que mon arrêt de bannissement était abrogé, que je pouvais rentrer en Allemagne, m’a laissé complètement froid et indifférent. Des télégrammes