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Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t2, 1905, trad. Khnopff.djvu/34

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se faire de façon intelligible que par un passage graduel, et non point par un brusque silence. Tout en continuant à parler d’un ton décidé et sans abandonner mon opinion, je me rappelle avoir dirigé la conversation simplement avec une certaine conscience artistique, laquelle, si Ton m’avait laissé procéder d’après mes intentions, eût conduit certainement à un dénouement conciliant, aussi bien au point de vue intellectuel qu’au point de vue moral. On se fût entendu et calmé en même temps. J’avoue que j’en demande trop ici, parce que, dès que la passion personnelle est en jeu, chacun veut avoir raison et veut être considéré comme blessé, plutôt que d’être amené à une entente. Dans cette occasion, comme dans beaucoup d’autres encore, je ne suis arrivé qu’à me faire reprocher de me complaire en mes discours. Vous-même, je le crois bien, vous êtes trompée, un instant, ce soir-là, et avez craint que mes premières paroles après cet éclat, très vives encore, ne fussent l’effet d’une excitation durable ; et cependant je me souviens de vous avoir répondu d’un ton fort calme : « Laissez-moi donc revenir à notre point de départ, cela ne peut pas aller si vite ! »

Croiriez-vous que pareilles expériences ont quelque chose de très pénible pour moi ?… Vraiment, j’aime mes semblables, et ce n’est pas une humeur farouche, égoïste, qui m’éloigne