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Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t2, 1905, trad. Khnopff.djvu/47

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poussait en avant, avec des hochements de tête et un air de mauvaise humeur. À présent, il a remporté la victoire. Il dit ouvertement que j’en suis arrivé à l’impossible. Je me demande si ce jeune et enthousiaste cœur de femme n’est pas ébranlé maintenant et ne donne pas intérieurement raison à l’homme d’expérience, à l’homme prudent, — à l’homme « sage », si vous voulez ! — Qu’en pensez-vous ? Le jeune grand-duc le fera sûrement.

Voyez-vous, mon enfant, ceci et d’autres expériences du même genre ont réveillé quelque peu mon ancienne humeur batailleuse : c’est un peu fou, mais déjà le fait que je vis est une folie, vous devez l’avouer. L’impossible m’a déjà excité à combattre ; et d’avoir Paris en vue, comme je l’ai maintenant, m’a longtemps semblé chose impossible. Mais pour l’impossible j’ai une mesure toute particulière et intime : mon état d’âme seul, et mon penchant vers la persévérance me diront si j’arriverai à réaliser ce que j’ai entrepris, et, en conséquence, seule la chose pour laquelle j’aurai perdu le goût me paraîtra impossible. Ceci peut se produire facilement, car le dégoût possède un terrible pouvoir en moi et quand il se montre clairement, il est invincible. Je ne le combats donc point ; c’est à lui qu’il appartient de juger les possibilités. Je le sens souvent, et alors ce sont pour moi des journées misérables. Puis