Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t2, 1905, trad. Khnopff.djvu/77

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tachons à l’événement futur : si votre œuvre est repoussée, nous saurons où nous en sommes et renoncerons à tout espoir ; si elle est acceptée, et cela du premier coup (car le Français ne peut être influencé autrement), nous respirerons tous : car, ce n’est pas la science et la littérature, mais l’art théâtral seul, par son action immédiate et générale, qui peut mettre sa forte empreinte sur l’esprit et les idées de notre nation. Mais… nous sommes certains du succès le plus grand et le plus durable !… »

Par le fait, même le directeur, qui connaît mieux le sujet maintenant, se vante, à qui veut l’entendre, de pouvoir compter, avec Tannhäuser, sur un vrai « succès d’argent ».

À Bruxelles, j’ai souvent causé avec un homme remarquable, un vieux diplomate, très intelligent, spirituel et d’une expérience peu commune,[1] qui me recommanda vivement de ne pas négliger les Français : on peut en penser et dire ce qu’on veut ; il n’en reste pas moins indéniable que les Français sont présentement le véritable prototype de la civilisation européenne, et faire sur eux un effet décisif, c’est agir sur l’Europe toute entière.

Tous ces sons de cloche n’ont vraiment rien que d’encourageant, et je vois bien que je

  1. Le conseiller d’État Klindworth ; voir Glasenapp, II, 2, 252.