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DIX ÉCRITS DE RICHARD WAGNER

rable. On montre encore la place des anciennes excavations, et, dans ces derniers temps, on s’est occupé de déblayer plusieurs puits dans le but de retrouver et de recueillir les cadavres des deux pauvres mineurs. Les travaux sont poussés avec activité, et chaque passant emporte un fragment de ce déblai en échange d’une menue monnaie, parce que c’est une affaire d’amour-propre que de paraître avoir participé à cette pieuse réparation. Parfois, dit-on, l’on rencontre encore des filons étincelants que l’on transforme par la fusion en beaux ducats d’or ; mais quant aux deux mineurs et au joyau magique, il y a longtemps que personne n’y pense plus.

Je ne saurais dire avec quelque certitude si cette légende est de pure invention ou basée sur quelque fait réel ; mais elle mérite en tout cas d’être mentionnée par les applications dont cette allégorie est susceptible, car le talisman mystérieux peut être regardé comme l’emblème du secret magique, idéal, de l’art musical. Sur cette seule donnée, il serait facile de découvrir une assimilation à la mine et aux décombres. En effet, celui qu’inspire le génie de la musique et qui éprouve le besoin de traduire en notes ses pensées intimes, rencontrera d’abord l’amoncellement des ruines, et parviendra peut-être ensuite dans la mine, régulièrement creusée par l’art ; mais combien peu pénétreront jusqu’à la crypte profonde où repose la divine essence ? Le nouvel adepte se