Page:Wagner - L’Anneau du Nibelung, trad. Ernst.djvu/104

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

c’eût été rendre inintelligible tout le récit de Siegmund, au premier acte de la Walkyrie.

Ayant adopté et appliqué cette méthode, après une longue étude de la question, j’espère être parvenu, tout en respectant scrupuleusement la musique, à faire pressentir dans ma traduction la langue particulière du poème original, cette rude langue du Ring, aux raccourcis rapides, simple et puissante, nerveuse, concentrée, d’accent farouche et de sauvage énergie.

TEXTE RIMÉ OU TEXTE RYTHMÉ. ― PROSODIE.

L’habitude, en France, est de rimer les poèmes destinés à être mis en musique. Il est naturel, étant donnée la faible inégalité d’accentuation des syllabes (les syllabes dites muettes exceptées), que l’on ait longtemps considéré la rime comme le seul moyen de déterminer pour l’oreille les mètres employés, car elle isole les vers et rend leur loi plus apparente. Mais le discours musical se faisant de plus en plus libre à mesure que la symphonie dramatique s’enrichit davantage et s’affranchit mieux des formes convenues, on commence à douter de cette obligation. D’autre part, la rime gêne évidemment le traducteur en son désir de littéralité et son respect de la musique : s’il conserve la rime, il se heurtera même à de vraies contradictions au point de vue de la prosodie musicale, à moins d’adopter un système de rimes identique à celui de l’auteur — tour de force qu’on ne peut réaliser qu’accidentellement, et dans les pages où la précision du discours, la rigueur de la littéralité, ne sont pas absolument nécessaires. Or, si le poème original n’est pas rimé, la difficulté supplémentaire