Page:Wagner - L’Anneau du Nibelung, trad. Ernst.djvu/106

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qui sévit si tristement dans nos opéras et drames lyriques contemporains.

Les noms propres conservés dans ma traduction comptent prosodiquement avec leur accent tonique original, lequel, on le sait, est inverse du nôtre. Ainsi, dans Wotan, Siegmund, Walhall, Wälsung, Brünnhilde, Hunding, etc., la première syllabe est la syllabe forte, accentuée ; c’est elle que Wagner place sur le temps fort, ou tout au moins sur la partie forte du temps. Il faudra donc prononcer à l’allemande ces différents noms[1]. Ce parti offre l’avantage de garder aux noms germaniques leur couleur, leur aspect, leur sonorité véritables, au lieu de les défigurer ridiculement. Il m’a permis de leur laisser aussi presque toujours la place qu’ils occupaient dans le texte de Wagner, par conséquent leur valeur rythmique, leur rôle poétique, leur accent expressif.

Je n’ai pas rigoureusement évité l’hiatus. Telle qu’elle existe en effet dans notre versification, la règle de l’hiatus est manifestement arbitraire, car elle autorise dans le corps de certains mots des rencontres de voyelles aussi dures, sinon plus, que celles qu’elle interdit entre deux mots. D’ailleurs, au point de vue de l’oreille, je trouvais inutile d’introduire une limitation que Wagner n’a pas admise, et l’effet musical devait diriger toutes mes considérations prosodiques. Cependant je n’ai pas affirmé systématiquement ce droit aux rencontres de voyelles, et ne l’ai voulu exercer qu’à bon escient, en des occasions assez peu nombreuses. Les mots tels que duel, hier, que nos poètes français font monosyllabiques ou dissyllabiques suivant les circonstances, portent, dans la présente

  1. Il n’est pas plus difficile à nos chanteurs de prononcer ces noms avec l’accent tonique allemand que de prononcer à l’espagnole dans Carmen, ainsi qu’ils ont coutume, des noms tels que Escamillo ou Carmencita.