de radicaux sont beaucoup moins sensibles ; en outre, les chaînes de dérivés et d’analogues, au double point de vue étymologique et phonétique, ne se correspondent pas du tout en français et en allemand. On ne saurait donc tenter de reproduire l’allitération wagnérienne, telle qu’elle existe dans le poème original.
Il demeure cependant possible, et souvent utile, de rappeler pour l’oreille, dans une mesure variable, cette allitération originale, c’est-à-dire de ne point éviter, de rechercher même, les analogies et les symétries sonores, autant que le permet la nature de notre langue. Cette allitération facultative a plusieurs avantages. En premier lieu, elle donne à la traduction un caractère spécial, déterminé, une volonté d’art ; en second lieu, elle accentue les rythmes, souligne et renforce les significations expressives, accuse la concision et la vigueur du texte, rend la sonorité du langage plus énergique, plus matérielle, plus active. Elle indique à l’interprète les effets qu’il devrait obtenir ; elle le conduit à la justesse, à l’énergie de la déclamation wagnérienne. Par elle enfin, un reflet subsiste de la forme de versification adoptée par le poète-musicien ; quelque chose reste, parfois, dans l’union de la parole et de la note, de ce qu’on pourrait appeler la couleur phonétique de la mélodie vocale. On trouvera donc, en mon texte : tantôt l’allitération véritable, comme à ce passage, La fleur se fane — le feu s’éteint ; tantôt des analogies de syllabes ou de mots symétriquement placés, comme Amour et Avril (Liebe und Lenz) ; tantôt une « couleur » spéciale de consonnes et des renforcements d’accent.
Tel est le système dont j’ai usé, bien qu’avec une liberté fort grande, car, à ce désir de la couleur sonore des mots et des phrases, je n’ai sacrifié aucune des considérations exposées plus haut. J’ajouterai que j’ai volontairement multiplié les