Page:Wagner - L’Anneau du Nibelung, trad. Ernst.djvu/160

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–––––––––––Parle, explique !
–––––––––Oh ! pourquoi effrayer ton enfant !
–––––––––––Raconte-moi :
–––––––––––mon cœur est sûr ;
–––––––––vois, Brünnhilde prie !
(Elle appuie sa tête et ses mains, avec abandon et tendre angoisse, sur la poitrine et les genoux de Wotan.)
Wotan.
(la regarde longuement dans les yeux, et lui caresse les boucles de la chevelure : comme revenant à lui après une profonde méditation, il commence enfin à parler, d’une voix très basse)
–––––––––––Si je l’exprime,
–––––––––––n’est-ce briser
–––––––––ce qui tient encor mon vouloir ?
Brünnhilde.
(lui répondant d’une voix pareillement basse)
–––––––––A ton vouloir tu parles,
–––––––––me disant ton désir :
–––––––––––qui — suis-je,
–––––––––––hors ton vouloir vivant ?
Wotan.
–––––––––Ces choses qu’à tous mon cœur cèle,[1]
–––––––––––inexprimées
–––––––––––toujours qu’elles restent :
–––––––––––à moi je parle,
–––––––––––parlant à toi. — — —
(D’une voix plus assourdie encore, plus lugubrement mystérieuse, tandis qu’il regarde Brünnhilde fixement dans les yeux.)
–––––––––––Du jeune Amour
–––––––––––la joie m’ayant fui,
–––––––––mon cœur souhaita le Pouvoir :
–––––––––––l’ardent désir
–––––––––––grondant en ce cœur
–––––––––soumit le monde entier.
–––––––––––Sans le comprendre,
–––––––––––œuvre trompeuse,
–––––––––––j’ai sous mes lois
–––––––––––englobé le mal :
–––––––––Loge m’a pris dans ses ruses,
–––––––––et puis, errant, a fui. —
  1. Var. : Ces choses cachées à tout être,