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ALBERICH, marchant sur WOTAN et LOGE, avec colère.

Vous, que cherchez-vous ici ?

WOTAN

A croire les contes qu’on nous faisait sur le ténébreux Nibelheim, Alberich y réaliserait de puissants miracles : c’est pour en assouvir notre curiosité que nous sommes venus, en visiteurs.

ALBERICH

C’est la haine et l’envie, sans doute, qui vous amènent à Nibelheim : d’aussi téméraires visiteurs, croyez-moi, je les connais fort bien.

LOGE

Si tu me connais tant, Alfe sans raison, qui suis-je, dis-moi, que tu clabaudes de la sorte ? Quand tu gisais, blotti, dans un trou froid, qui, avant que t’eût jamais ri Loge, t’a donné la lumière, la chaleur de la flamme ?[1] Ton art de forgeron, à quoi te servirait-il, si je n’avais allumé ta forge ? Je suis ton cousin, et je fus ton ami : ta gratitude est donc, je trouve, bien maladroite !

ALBERICH

C’est pour les Alfes-de-Lumière[2] que Loge, le rusé, Loge, le fourbe, réserve à présent ses sourires : Traitre ! si tu es leur ami comme tu fus, jadis, mon ami, haha ! tant mieux pour moi ! je n’ai rien à craindre d’eux.

LOGE

Et voilà bien pourquoi tu peux, j’imagine, te fier à moi ?

  1. J’ai déjà rappelé que Loge est le Dieu du Feu.
  2. « Sur les cimes nébuleuses, les Dieux habitent Walhall. Ce sont des Alfes-de-Lumière, » dit à Mime, dans le drame de Siegfried, Le Voyageur (acte 1er). – Sur les Alfes en général, voir la note (1) de la p. 434. – Cf. aussi p. 233, note (2).