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Page:Wagner - Lettres à Auguste Rœckel, 1894, trad. Kufferath.djvu/45

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à-dire ce qui est simplement factice, imaginaire. Si donc j’ai le droit d’appeler véracité le sentiment le plus complet de la réalité en tant qu’il se manifeste, la vérité ne sera plus, après tout, que la notion abstraite de ce sentiment; c’est tout au moins ce qu’en a fait la philosophie. Seulement, cette notion est aussi éloignée de la réalité que la véracité, — dans le sens indiqué, — s’en rapproche, au contraire ; d’où il est résulté que, de tout temps, on n’a jamais erré plus profondément qu’en ce qui concerne la vérité ; en somme, ce mot est devenu le plus fallacieux qui soit. Comme toute notion abstraite, vérité n’est plus qu’un de ces mots avec lesquels on peut former de belles théories, mais non pas embrasser la réalité. Celle-ci, nous ne pouvons la connaître qu’au moyen de la sensation, et la sensation, c’est ce qui est perçu par les sens. Bien entendu, il ne faut pas entendre le mot sens selon la signification dégradante que lui donnent les philosophes et les théologiens, c’est-à-dire le sens animal; il s’agit du sens humain, qui va si loin qu’il peut mesurer les étoiles et se représenter le cours des astres. Ceci dit, nous nous entendrons aisément au sujet du monde, en tant qu’il est l’objet de notre perception du Vrai. Mais il faut, pour cela, laisser agir librement notre sentiment seul et ne considérer que les impressions éprouvées par lui. L’homme se sert, conformément à son organisme, d’un nom-