Page:Wagner - Lettres à Auguste Rœckel, 1894, trad. Kufferath.djvu/69

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Pour le moment, je n'ai rien à t'envoyer qui soit de nature à t'intéresser : moi-même je suis actuellement étranger à toute lecture. Mais, dès que je trouverai quelque chose, je te le communiquerai. Mon Tannhœuser se joue presque partout aujourd'hui en Allemagne ; les petits théâtres, en particulier, l'ont tous monté, tandis que les grands, — tu comprends pourquoi, — se tiennent encore sur la réserve. Au sujet de ces exécutions, j'apprends qu'elles sont généralement détestables; au fond, je ne m'explique pas d'où peut venir le succès ; heureusement, je ne vois rien de tout cela, si bien que je suis assez insensible à cette prostitution de mes œuvres; récemment, toutefois, j'ai éprouvé une sensation péniblement douloureuse à propos de la première exécution de Lohengrin, à Leipzig : on me dit qu'elle a été épouvantablement mauvaise : pendant toute la soirée, — sauf le récit du Héraut, — on n'a pas entendu un mot des paroles ! Aussi j'en arrive à regretter d'avoir autorisé la représentation. A Boston, on donne déjà des Wagner-nights, des concerts où l'on ne joue que des compositions de moi. On me propose d'aller en Amérique : s'ils pouvaient là-bas me procurer les moyens qu'il me faut, qui sait, j'irais peut-être; mais trimballer comme donneur de concerts, même pour beaucoup d'argent, personne franchement ne l'attendra de moi ! Et maintenant, cher, il faut bien que je ter-