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Page:Wagner - Quatre Poèmes d’opéras, 1861.djvu/51

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— XLIII —

salutaires et encourageantes que je crus devoir en tirer.

Il est évident qu’il ne s’agissait pas ici de la portée plus ou moins grande de mon talent ; les critiques les plus hostiles eux-mêmes ne se déclaraient pas contre ce talent, mais contre la direction que j’avais suivie, et ils cherchaient à expliquer mon succès définitif en disant que mon talent valait mieux que ma tendance. Parfaitement insensible à ce que le jugement porté sur mes facultés pouvait avoir de flatteur, je n’avais à me féliciter que d’une seule chose, c’était le sûr instinct qui m’avait conduit à l’idée d’une égale et réciproque pénétration de la musique et de la poésie, comme condition d’une œuvre d’art capable d’opérer, par la représentation scénique, une impression irrésistible, et de faire qu’en sa présence toute réflexion volontaire s’évanouisse dans le sentiment purement humain. Je voyais maintenant cet effet produit, malgré les faiblesses encore très-grandes de l’exécution, à l’exactitude de laquelle je suis forcé d’ailleurs d’accorder tant d’importance : il y avait là de quoi me faire concevoir des idées plus hardies encore de la toute-puissante efficacité de la musique ; j’aurai à m’expliquer avec vous plus catégoriquement sur cette portée sans limite, et je le ferai dans un instant.

C’est un point difficile et d’une importance extrême, sur lequel je ne puis espérer de m’expliquer clairement, qu’à la condition de m’occuper exclusivement de la forme. J’avais essayé dans mes écrits théoriques de déterminer la forme en même temps que la substance, et je ne pouvais le faire théoriquement que d’une manière