Page:Wagner - Quinze Lettres, 1894, trad. Staps.djvu/30

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comment ma mère, avec son grand cœur et son humeur sereine, l’avait soutenu et fortifié et combien, depuis leur retour en 1815, la vie leur était devenue facile, grâce au développement des affaires de mon père. Les sentiments qui avaient fait la grandeur de la guerre de l’Indépendance, vibraient encore quand je passai de l’enfance à la première jeunesse et je pense qu’il y avait déjà quelque chose de cet enthousiasme dans l’âme inconsciente de l’enfant.

La fleur bleue du romantisme, telle qu’elle a fleuri dans les îles des Bienheureux, n’a jamais été de mon goût, mais c’est avec admiration que je contemplais ceux qui avaient pris part à la guerre de l’Indépendance ; un ami de mon père, qui en était revenu estropié, était mon idéal. Les nobles paroles de Körner retentissaient en moi aux sons triomphants des merveilleuses mélodies de Weber. Encore aujourd’hui mon âme vibre à ce souvenir. La dignité virile et l’héroïsme ! La fidélité jusqu’à la mort à la patrie et à la femme aimée ! Tels étaient les rêves que m’inspirait le romantisme. — L’année 1830 avait réveillé les champions de la liberté : Polonais et Italiens traversaient l’Allemagne en bannis et en suspects, les persécutés et les martyrs de notre patrie étaient pour nous des victimes sacrées.