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DÉFENSE D’AIMER

ment dirigée contre le puritanisme hypocrite, et conduisant en conséquence à la glorification hardie de la « libre sensualité ». Je ne me donnai pas la moindre peine pour comprendre autrement que dans ce sens l’austère sujet de Shakespeare ; je ne vis que le gouverneur sombre et rigoriste brûlant lui-même d’un amour formidablement passionné pour la belle novice, et celle-ci, tout en implorant de lui la grâce de son frère condamné pour un forfait d’amour, allumant dans le rigide puritain la plus funeste flamme par le rayonnement de la belle chaleur de ses sentiments humains. Que ces puissants motifs dramatiques ne fussent si richement développés, dans la pièce de Shakespeare, que pour peser enfin avec plus de force dans la balance de la justice, c’est ce que je ne me souciais nullement de remarquer ; une seule chose m’importait, dévoiler ce qu’il y avait de coupable dans l’hypocrisie, et d’antinaturel dans le rôle cruel de censeur. Je laissai donc complète-