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LES PAPILLONIDES DES ÎLES MALAISES.

d’organisation, qui constitue la preuve d’une origine spéciale. Cette définition nous contraindra à négliger entièrement le degré de différence qui existe entre deux formes quelconques, et à ne tenir compte que de sa permanence.

Le principe que j’ai donc adopté et auquel j’ai tâché de me conformer est celui-ci : lorsque deux formes habitent des régions distinctes, que leur différence paraît constante, que celle-ci d’ailleurs peut aisément se définir et n’est pas limitée à un seul caractère, j’ai considéré ces formes comme des espèces. Si, au contraire, les individus de chaque localité variant entre eux, la distinction des deux races devient moins claire et moins importante, ou si celle-ci, bien que constante, ne se manifeste que dans un seul caractère, tel que la taille, la couleur ou quelque autre détail extérieur, je classe l’une des formes comme variété de l’autre.

Je trouve en général que la permanence d’une espèce est en raison inverse de son étendue : elle est très-grande chez celles qui sont limitées à une ou deux îles ; dès qu’elles s’étendent à beaucoup d’îles, des variations se manifestent ; celles-ci deviennent très-grandes en même temps que très-instables, si les espèces occupent une grande partie de l’archipel. Cela s’explique, au moyen des principes de M. Darwin. Si une espèce existe dans une grande étendue de pays, elle doit avoir eu, et probablement possède encore une grande puissance de dispersion ; cette circonstance, amenant le mélange fréquent des formes qui, sous l’influence des conditions propres à chaque région de l’habitat, tendraient à de-