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L’INSTINCT CHEZ L’HOMME ET LES ANIMAUX.

pose que certains organes très-petits, abondamment pourvus de nerfs et situés chez la plupart des insectes dans la veine sous-costale de l’aile, sont les organes de l’ouïe. Mais, en outre, les orthoptères (grillons, sauterelles, etc.) ont sur les pattes de devant des organes qu’on suppose être des oreilles, et M. Lowne croit que les petites boules pédicellées qui sont les seuls restes des ailes postérieures dans les mouches, sont aussi des organes de l’ouïe ou de quelque sens analogue. Chez les mouches aussi, la 3e articulation des antennes contient des milliers de fibres nerveuses, qui se terminent en petites cellules ouvertes, et que M. Lowne considère comme l’organe de l’odorat ou de quelque autre sens, peut-être nouveau pour nous. Il est donc fort possible que les insectes soient doués de sens particuliers, au moyen desquels ils perçoivent des choses qui nous restent toujours inconnues, et peuvent accomplir des actes qui nous paraissent incompréhensibles.

Dans cette ignorance complète où nous sommes de leurs facultés et de leur nature interne, n’est-il pas téméraire de vouloir juger de leurs forces par une comparaison avec les nôtres ? Comment pouvons-nous prétendre pénétrer le mystère de leur nature mentale et prononcer sur l’étendue de leurs perceptions, dire jusqu’où peuvent aller leur mémoire, leur raison ou leur réflexion ! Passer d’un seul bond de nos propres perceptions à celles d’un insecte, est aussi déraisonnable et absurde que vouloir, avec la seule connaissance de la table de multiplication, aller droit au calcul in-