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Page:Waller - Lysiane de Lysias, 1885.djvu/111

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tout un navrement, et qui paraissaient regarder dans le vague un point noir et funèbre.

Là, d’heure en heure, la causerie s’alentissait ; les paroles devenaient rares, s’échappaient en monosyllabes tristes, comme les gouttes d’une sauce épuisée ; elles redisaient la pensée désespérante de la veille : « Où allons-nous ? Et après ? » Toujours ce mot : « et après ? » qui semblait indiquer du doigt un abordage final où, dans la tempête, leur crâne sauterait comme une carène sur la torpille. « Et après ? » ils avançaient dans les heures avec ce mot de ralliement qui n’avait jamais de réponse, tant ils se comprenaient muettement, de la main tremblante, du regard errant, de la lèvre entr’ouverte pour dire — et qui ne disait pas.

Et les heures étaient interminables.

Aussi lorsque le soir de la représentation de l’Eden, il revint chez lui au bras de Marius, Ferrian fut-il heureux, bien heureux en songeant que le lendemain il aurait consommé sa résolution de s’arracher à l’atmosphère étouffante de cette vie sans issue.