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Page:Waller - Lysiane de Lysias, 1885.djvu/33

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toute, et dont elle ne pouvait se dévêtir. Elle eût voulu trouver, et ne savait. Le duc la traitait en enfant presque, ne voyait pas le trouble de la jeune femme, ne songeait pas à ce travail intérieur qui la torturait.

Elle voulut lire à présent, et, quoique Grégory la guidât, elle arriva à ne plus choisir, tant elle espérait que le hasard lui trancherait ce nœud qui lui liait la gorge et l’étouffait davantage de minute en minute.

Grégory ne changea point de manière. Il aima Christine paternellement, l’entoura de soins et d’attentions, tout en gardant malgré lui cette raideur britannique qui l’avait fait surnommer « le lord » par ses amis. Mais jamais il n’eut plus que cette calme sollicitude, et, sans s’éloigner de Christine, inspira à celle-ci une sorte de respect craintif.

Elle se renferma dans sa cruelle ignorance d’amour, et ce fut d’une âme déchirée qu’elle relut ces vers :

Maudit soit à jamais le rêveur inutile
Qui voulut le premier, dans sa stupidité,
Méprenant d’un problème insoluble et stérile,
A ux choses de l’amour mêler l’honnêteté !

Celui gui veut mêler par un accord mystique
L’ombre avec la chaleur, la nuit avec le jour,
Ne chauffera jamais son corps paralytique
A ce rouge soleil que l’on nomme l’Amour !

Christine eût voulu demander à Grégory le sens de ces strophes maladives, et n’osait. Il lui semblait avoir en elle une virginité qui s’accorderait mal avec ces questions voilées à son intellect, et que le duc l’estimerait moins.