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Page:Waller - Lysiane de Lysias, 1885.djvu/56

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Lorsque le thé fut prêt, Christine indiqua du doigt un siège, plus bas que le sien, à son mari ; puis, s’étant à demi couchée sur le divan, laissant voir son pied nu dans une mule faite de mailles d’or, elle regarda le duc.

Celui-ci la regarda de même, ébloui, stupéfait, presque timide devant cette femme qui était la sienne, et qu’il ne pouvait reconnaître. Il ne retrouvait plus la jeune fille restée jeune fille malgré le mariage ; une autre lui apparaissait, transformée, superbe.

— Je vous écoute, Madame, prononça-t-il.

— Voici, mon cher maître, je voudrais simplement savoir si vous avez une ou des maîtresses. Oh ! ne répondez pas non, par galanterie d’époux. Je vous assure qu’un oui n’ôtera rien de l’affection et du respect que j’ai pour vous. Vous êtes libre de chercher dehors ce que vous ne trouvez plus dedans ; vous m’avez épousée sans amour et je me suis donnée sans foi ni conscience ; vous êtes donc bien libre et Dieu me garde d’invoquer un titre d’épouse, qui n’est ratifié par aucune loi sérieuse, pour vous rendre la vie désagréable par des récriminations dignes des gens de peu. Les épouses délaissées ne sont acceptables que dans les tragédies, et cela ne se lit même plus. Vous avez donc des maîtresses ; votre silence le dit ; merci de votre franchise. Ces femmes, vous ne les affichez pas, et vous restez le vrai gentilhomme que m’a donné ma mère. Je ne vous blâme pas ; seulement, si vous vous êtes fait libre, je veux faire de même.

— Qu’est-ce à dire, Madame ? dit Grégory avec un mouvement de révolte.