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Page:Waller - Lysiane de Lysias, 1885.djvu/62

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voyait tour à tour deux têtes, aux traits alternatifs, si bien que parfois elles n’en faisaient plus qu’une, sur laquelle il hésitait à mettre un nom. Tantôt c’était le regard étourdissant et noir de Lysiane, que rencontrait le regard de son rêve, tantôt l’œil limpide de la duchesse.

Lorsque les premières feuilles de l’automne commencèrent à tomber dans les bois, et que la mer prit les teintes vertes des premières tempêtes, Grégory reçut de Marie-à-laBruyère une lettre affectueuse lui disant que tout était prêt pour le recevoir et qu’on l’attendait s’il avait le désir de se mêler aux grandes chasses. Mal accoutumé à n’être plus, quoique d’après son acquiescement même, qu’un étranger que les questions d’intérêt seules liaient à sa femme, il eut un mouvement de colère en recevant cette sorte d’avis à venir ou à ne pas venir, auquel ne se joignait rien de plus que des mots d’amitié respectueuse. Le désir de revoir Christine l’emporta. Il partit.

Lorsque l’on descend, à quelques minutes d’Anvers, à la petite gare d’Eeckeren, on a devant soi une longue route plantée de chênes d’Amérique, et bornée, à droite par une immense étendue de bruyère, à gauche par les champs. La drève est poussiéreuse ; les charrettes et les batteries d’artillerie y ont creusé de larges sillons. Si l’on continue, on dépasse bientôt le village de Brasschaet, et, avant d’arriver aux campements militaires dont on entend résonner au loin les claironnades, on trouve à sa droite un village de quelques maisons ; c’est Maria-ter-Heyden (Marie-à-la-Bruyère).