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Page:Waller - Lysiane de Lysias, 1885.djvu/87

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Christine est là, couchée sur le divan. Elle a vu revenir le duc, elle devine qu’il est retourné à Rouge-Cloître ; il est demeuré trois heures absent. L’Initiée triomphe.

Superbe, elle se dresse ; ses grands yeux rayonnent de joie infinie. Sa haute taille moulée dans une cuirasse de satin noir semble grandir encore, elle se regarde, elle est belle, reine, maîtresse.

On annonce : Monseigneur.

C’est la première fois que, depuis un an, la duchesse reçoit son mari chez elle.

Grégory frissonne en la voyant ; tout le passé revient, ses angoisses, ses colères — et toujours ce désir qui lui brûle le sang.

— Madame, je vous trouble dans votre repos, pardonnezmoi. Ce sera la dernière fois. Je viens prendre congé de vous ; je pars pour longtemps sans doute et je puis ne pas revenir ; il faut donc que nous réglions ensemble les questions d’intérêt. Je vous laisse toute…

— Pardon, Monsieur, vous irez loin ?

— Très loin.

— Et je ne puis savoir…

— Merci pour cet intérêt que vous me portez ; j’ignore moi-même où j’irai…

— Mais on ne voyage pas ainsi, dit Christine en souriant doucement, voyons, puisque vous partez, donnez-moi la main, parlez-moi comme à une amie.

— Christine, murmura-t-il, je pars au pays où je ne vous trouverai pas, très loin, si loin que la fatigue me jetera brisé par terre — et je m’endormirai !