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Page:Walter - Voyage autour du monde fait dans les années 1740, 1, 2, 3, 4, 1749.djvu/260

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On lui a remontré que ces soieries de la Chine, transportées directement à Acapulco se donnoit à bien meilleur marché, que celles qui se fabriquoient à Valence et en d’autres Villes d’Espagne ; et que l’usage des Toiles de Coton de la Côte de Coromandel réduisoient presque à rien le débit des Toiles d’Europe, transportées en Amérique, par la voie de Cadis. Il est clair que ces raisons sont solides, et que ce Commerce de Manille rend le Méxique et le Pérou, moins dépendans de l’Espagne, à l’égard de plusieurs Marchandises très nécessaires, et qu’il détourne de très grandes sommes, qui sans cela, passeroient en Espagne, en payement de ses Produits et Manufactures, et au profit des Marchands et Commissionaires d’Espagne. Au-lieu qu’à présent ces Trésors ne servent qu’à enrichir des Jésuites et quelques autres personnes en petit nombre, à l’autre bout du monde. Ces raisons parurent si fortes à Don Josep Patinho, Prémier-Ministre en Espagne et fort peu ami des Jésuites, qu’il résolut, vers l’année 1725 d’abolir ce Commerce, et de ne permettre le transport d’aucune Marchandise des Indes Orientales en Amérique, que par le moyen de Vaisseaux de Regître, partis d’Europe. Mais le crédit de la Société para le coup.

Il part donc tous les ans un Vaisseau ou deux, tout au plus, de Manille pour Acapulco. Le tems de leur départ est le mois de Juillet, et ils arrivent à Acapulco, en Décembre, Janvier ou Février suivant : après y avoir disposé de leurs effets, ils repartent ordinairement pour Manille en Mars, et y arrivent en Juin ; desorte que tout le voyage dure à peu près un an. Quoiqu’il n’y ait le plus souvent qu’un seul Vaisseau à la fois en mer, il y en a toujours un autre tout prêt à partir au retour du prémier ; ainsi l’on entretient toujours trois ou quatre gros Vaisseaux à Manille, afin qu’еп cas d’accident, le Commerce ne soit pas interrompu. Le plus considérable de ces Vaisseaux, dont je n’ai pu savoir le nom, n’est pas moins grand, suivant ce qu’on en dit, que nos Vaisseaux de Guerre du premier rang ; et il faut bien que cela soit, car lorsqu’on l’envoya avec quelques autres Vaisseaux de Manille, croiser sur les Côtes de la Chine, pour y troubler notre Commerce, il n’avoit pas moins de douze cens Hommes à bord. Les autres, quoique moindres, sont des Vaisseaux très considérables, de douze cens Tonneaux et au-dessus, montés ordinairement de trois cens cinquante à six cens Hommes, les Passagers compris, et d’une cinquantaine de Canons. Ce sont tous des Vaisseaux du Roi, de qui les Officiers reçoivent leurs commissions, et l’un des Capi-