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Quoique les Chinois n’eussent aucun lieu de révoquer en doute la véracité des Prisonniers Espagnols, ils trouvèrent dans leur réponse, deux points, qui leur laissèrent quelques scrupules, et qui avoient besoin d’explication : la grande infériorité en nombre des Vainqueurs à l’égard des vaincus, et l’humanité avec laquelle ces derniers avoient été traités après le combat. Les Mandarins demandèrent donc aux Espagnols, comment il étoit possible qu’ils eussent été pris par un Ennemi si inférieur à eux, et pourquoi les Anglois ne les avoient pas tous tués, dès qu’ils en avoient été les maîtres, puisque les deux Nations étoient en guerre. Les Espagnols répondirent à la première de ces questions, que le Centurion quoique beaucoup plus foible d’Equipage, étant un Vaisseau de guerre, avoit divers avantages sur leur Galion, qui n’étoit qu’un Vaisseau marchand, tels que la grandeur de ses pièces de Canon, etc. A l’égard de la seconde difficulté, ils dirent que l’usage entre les Peuples de l’Europe, n’étoit pas de mettre à mort, ceux qui se rendoient ; quoiqu’ils avouassent en même tems, que le Commandeur, suivant en cela la bonté naturelle de son caractère, en avoit agi à leur égard, et à celui de tous leurs Compatriotes, qui lui étoient tombés entre les mains, avec beaucoup plus de douceur et d’égards, que ne l’exigeoient les lois de la guerre, établies entre les Européens. Ces réponses satisfirent les Chinois, et leur donnèrent une haute idée du caractère de Mr. Anson.

Le 20 de Juillet, au matin, trois Mandarins, accompagnés d’une suite très nombreuse, et d’une Flotte de Chaloupes, vinrent à bord du Centurion, et remirent au Commandeur, l’ordre du Viceroi de Canton pour lui faire fournir journellement une certaine quantité de Vivres, et des Pilotes pour conduire les deux Vaisseaux, jusqu’à la seconde Barre. Ils lui dirent aussi en réponse à la Lettre qu’il avoit écrite au Viceroi que ce Seigneur s’excusoit de recevoir la visite du Commandeur, pendant les grandes chaleurs ; parce que les Mandarins et les Soldats qui devoient nécessairement assister à cette cérémonie, ne pouvoient s’assembler sans être exposés à une grande fatigue et à plusieurs autres inconvéniens ; mais que vers le mois de Septembre, lorsque le tems s’adouciroit, le Viceroi seroit fort aise de voir le Commandeur, et le Capitaine qui commandoit l’autre Vaisseau. Mr. Anson savoit qu’on avoit fait partir un Courier de Canton pour la Cour de Pekin avec la nouvelle de l’arrivée de ses deux Vaisseaux et il ne douta pas un moment, que le principal motif du renvoi de sa Visite, ne fût le dessein de gagner le tems nécessaire, pour re-