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commerce considérable, que nous avons à Canton par le moyen du baragouin Anglois de quelques Truchemens Chinois, ou par le canal très suspect d’Interprètes d’autres Nations.

Deux jours après l’envoi de la Lettre, dont il vient d’être fait mention, il y eut un Incendie dans les Fauxbourgs de Canton. Dès la prémière alarme, Mr. Anson y courut avec ses Officiers et l’Equipage de sa Chaloupe dans la vue d’aider à y remédier. Il trouva que le feu, qui avoit pris d’abord dans une façon d’appenti d’un Voilier, avoit fait de grands progrès, tant par la nature des Bâtimens voisins, que par la maladresse des Chinois : mais il remarqua qu’en abattant quelques appentis, qui étoient-là auprès, il y avoit moyen d’arrêter le mal. Il y avoit sur-tout une corniche de bois, où le feu avoit déjà pris, et qui pouvoit le communiquer à une grande distance. Mr. Anson ordonna à ses Gens d’abattre cette corniche, ce qu’ils commencèrent et dont ils seroient bientôt venus à bout, si on ne les avoit avertis que Mr. Anson, n’étant pas Mandarin, et n’ayant aucune autorité en cet endroit, on lui feroit payer tout ce qu’on abattroit par ses ordres. Sur cet avis, nos Gens s’arrêtèrent, et le Commandeur les envoya à la Factorie Angloise, pour aider à mettre à couvert les effets de la Compagnie : car il n’y avoit pas d’endroits qu’on put croire en sureté, contre un Incendie aussi grand, et qu’on ne travailloit point du tout à arrêter. Les Chinois se contentoient d’en être spectateurs et d’en approcher de tems en tems quelques-unes de leurs Idoles, dont ils paroissoient attendre de grands secours. Enfin il vint un Mandarin, suivi de quatre ou cinq cens hommes destinés à servir en pareille occasion ; ces Gens firent quelques foibles efforts pour abattre les maisons voisines ; mais le feu étoit trop violent et avoit déja gagné les Magazins des Marchans : d’ailleurs ceux qui travailloent à l’éteindre, n’avoient ni courage ni adresse ; et l’Incendie, qui alloit de plus en plus en augmentant, ne menaçoit pas moins que de la destruction de la Ville. Dans la confusion extrême, que ce malheur causoit, le Viceroi se rendit en personne sur les lieux, et on fit prier le Commandeur de prêter son assistance, et de prendre toutes les mesures qu’il jugeroit à propos. Il y retourna donc, à la tête de quarante de ses Gens, qui donnèrent en cette occasion, un exemple tout nouveau à la Chine : il sembloit que les flammes et la chute des Bâtimens les animât, bien loin de les effrayer. Plusieurs tombèrent à terre avec les toits des Maisons, qu’ils abattoient eux-mêmes. Par bonheur les Maisons n’étoient que d’un étage, et les matériaux en étoient très légers,