Page:Wanda - La femme au doigt coupé, 1886.djvu/53

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— Ah ! pour cela, monsieur, reprit la dame, tout ce que je pourrai faire, c’est de vous la laisser pour neuf. Et là, vrai, c’est pour rien.

— J’y réfléchirai, dit Lafortune ; et saluant, il s’éloigna.

Allons, ami Lafortune, se disait-il, en reprenant tranquillement le chemin de son domicile, tu es en passe de devenir un des plus grands détectives de Montréal, et si tu, arrives au but, cette affaire sera ta fortune et ta gloire.

Demain, continua-t-il, il sera temps. Mais prendrai-je quelqu’un ? non, j’irai seul. J’aime mieux avoir tout achevé, sans le secours de personne ?

Tout en finissant son monologue, Lafortune se dirigeait vers sa demeure.

Il gravit lentement les marches du perron, fouilla dans sa poche, y prit une clef et la mit dans la serrure.

La clef grinça et la porte s’ouvrit.

Lafortune déposa son chapeau au portemanteau du vestibule, puis pénétra dans le salon.

Sur un sofa, au coin de la cheminée, une belle femme est nonchalamment étendue. Ses traits sont d’une pâleur de cire ; sa main est enveloppée d’un mouchoir de Baptiste. Son costume noir des pieds à la tête la fait encore paraître plus blanche.

— Comment allez-vous aujourd’hui ? lui demanda Lafortune en entrant.

— Mieux, mon ami, je vous remercie ; mais je me sens toujours bien lasse. Le docteur est venu ; il m’assure que tout va bien. Et vous, avez-vous enfin trouvé quelque chose ?

— Oui, reprit Lafortune ; et, se penchant alors vers la tête de la jeune femme, il lui parla à l’oreille.

Elle poussa alors un grand cri, devint plus pâle encore, s’il était possible, puis saisissant la main de Lafortune : « Ah ! mon ami, lui dit-elle, je vous devrai plus que la vie ! »