Page:Wanda - La femme au doigt coupé, 1886.djvu/55

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compagnon à transporter Ben, qui était trop bien bâillonné pour pouvoir pousser un cri, et qui ignorant où il était, ne chercha pas à opposer de résistance, ni à ameuter les passants.

Ils le conduisirent, ou plutôt ils le portèrent jusqu’à une chambre complètement noire dans laquelle ils se mirent en devoir de l’enfermer.

— En voilà un qui ne sortira pas de sitôt ! dit Simon ; mais c’est égal, j’aurais aimé à lui serrer les mains autour du cou. Il n’y a que les morts qui ne parlent pas !

— Possible, répondit Félix, mus je n’ai aucune envie d’être pendu ! Pas de meurtre inutile ! C’est déjà bien assez de la femme au doigt coupé. Ce damné gamin, à supposer qu’il sorte jamais d’ici, ne nous gênera toujours pas avant notre départ. C’est tout ce dont nous avons besoin.

— Savoir ! dit brusquement Simon qui n’aimait pas à faire les choses à demi, et qui commençait à trouver qu’avec leurs scrupules hors de saison, ses deux complices risquaient de gâter l’affaire. Enfin ! ajouta-t-il en guise de consolation, tout cela sera fini demain. Mais il était temps !

— As-tu les billets ? demanda Félix.

— Non, mais je vais les chercher et je te les remettrai.

— Où ?

— Mais ici. L’endroit est bien choisi pour ne pas attirer l’attention ; et nous savons que personne ne nous y dérangera.

— À quelle heure ?

— À quatre heures.

— C’est bien, on y sera ; reprit Félix, et tous deux se dirigèrent vers la porte de sortie. La maison dans laquelle ils venaient de conduire leur prisonnier appartenait à un irlandais ami de Félix, qui lui en avait confié la surveillance, en le chargeant de chercher un locataire. Cet irlandais n’habitait pas à Montréal ; et les deux complices avaient eu raison de dire qu’il n’était pas à craindre que quelqu’un vint les déranger