Page:Wash Irving voyage dans les prairies.djvu/251

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yeux enflammés, effarés, exprimant la colère et la frayeur.

Pendant quelque temps je courus en ligne parallèle avec eux, sans pouvoir forcer mon cheval à les approcher à portée du pistolet, tant il avait été épouvanté de l’assaut du buffle dans la précédente rencontre ; enfin je réussis ; mais mes pistolets firent encore long feu. Mes compagnons, qui n’avaient pas d’aussi bons chevaux, ne purent regagner le troupeau ; cependant, M. L… tira son fusil de chasse : la balle atteignit un buffle au-dessus des lombes, brisa l’épine du dos, et l’animal tomba. M. L… descendit de cheval pour achever sa proie ; alors j’empruntai son fusil, qui contenait encore une charge, et, reprenant le galop, je rattrapai les fuyards, que poursuivait aussi le comte. Avec cette arme je n’avais plus besoin de pousser mon cheval aussi près de notre gibier formidable ; et lorsque je fus à leur niveau, je choisis un des plus beaux buffles, et je l’abattis par un coup heureux. La balle avait porté sur une partie mortelle : il ne put faire un seul pas, et resta par terre à se débattre dans les angoisses de l’agonie, tandis que le reste de la troupe continuait à courir tête baissée à travers la prairie avec un bruit égal au tonnerre.