Page:Waters - Les hommes du jour Sir John A. Macdonald, 1890.djvu/13

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pays. Il y a cependant la distance de la coupe aux lèvres entre cette supposition et les faits. Chose étrange : bien que les Anglais ne commencent à s’intéresser activement aux affaires publiques qu’au moins cinq ans après les jeunes gens du Canada et dix ans après leurs cousins des États-Unis, (qui s’occupent d’affaires municipales dès l’âge avancé de douze à treize ans), ils sont, quand leur heure est venue, tout aussi capables de se former une saine et intelligente opinion des questions publiques que les plus précoces politiciens ; et les hommes d’État anglais s’élèvent généralement à un bien plus haut degré de perfection, d’intelligence et de dignité politiques. De là vient qu’on considère souvent comme un compliment de comparer un homme d’État colonial ou américain à un homme d’État anglais. Il a été dit de Sir John qu’il était « more than a colonial mind. » Ce n’est pas très flatteur pour les colonies, mais ce l’est d’autant plus pour notre premier ministre.

On a souvent comparé Sir John Macdonald à l’illustre Benjamin Disraeli, comte de Beaconsfield. Cette comparaison pourrait être prise pour un compliment à l’adresse de Sir John, si elle n’était tout aussi flatteuse pour Disraeli. Il y a sûrement de fortes ressemblances dans la personne, la vie et le caractère de ces deux hommes, bien que nous n’admettions pas un parallèle aussi frappant que certains enthousiastes veulent le faire. Il n’est pas à regretter non plus que Sir John diffère de caractère avec Disraeli en ce sens qu’il ne possède pas la vanité personnelle qui amenait ce dernier à parler de lui-même si souvent et d’une manière parfois ridicule. D’un autre côté, la gloire de Lord Beaconsfield est grandement due à son génie littéraire, que Sir John ne partage pas. Très distingué comme homme d’État, Disraeli est encore grand comme auteur ; et, pour citer ses propres mots dans la préface qu’il a écrite à l’ouvrage de son père, « Curiosities of Literature » : « Un auteur peut diriger la fortune du monde d’une manière plus étendue qu’un homme d’État ou un guerrier ; et les œuvres par lesquelles son influence se produit et s’exerce peuvent avoir l’intérêt et l’importance des décisions des corps législatifs les plus grands ou posséder la valeur stratégique déployée sur les champs de bataille les plus mémorables. » Il y a cependant auteur et auteur. Comme auteur, Lord Beaconsfield n’a pas exercé son influence sur la fortune du monde à un aussi