Elle avait entendu ces derniers mots. Elle regarda le tableau pour y trouver une explication, mais il n’y avait rien ; elles regarda les quatre figures : là non plus, rien. Elle voyait qu’il était arrivé quelque chose, mais le seul indice consistait en leurs physionomies et en ces mots murmurés par Robert. Il s’était passé dans cette pièce quelque chose d’affreux, d’épouvantable. Elle frissonna… il en restait une ombre entre ces murs, mais ce que c’était, elle ne pouvait le deviner.
Le vent, porteur de présages, soufflait plus fort dans la cheminée, le visage de Robert était sévère et fermé.
— Je m’en vais, dit-il. Et, se tournant vers Gillian : Un mot à vous dire, s’il vous plaît, Gillian.
Sans répondre, étonnée, elle le suivit. Il se tenait sur le seuil, sa silhouette se perdait presque dans l’obscurité d’une nuit douce qu’animait une chute à peine visible de neige. Debout sur la marche au-dessus de lui, sa forme à elle se découpait très nette sur le fond brillant et rougeâtre du bar ; leurs yeux étaient presque à la même hauteur.
— Je ne veux pas vous offenser, dit Robert, mais je vous serais reconnaissant de me dire une chose : aimez-vous oui, ou non, Ralph Elmer ?
Un flocon de neige se posa mollement sur son front, juste à l’endroit où elle avait mis un baiser. Le vent gémissait dans les herbes sèches autour de la porte.
« Si elle ne vous aimait pas, je vous tuerais. » Ces mots retentissaient dans le cerveau de Gillian, leur écho s’y répétait sans cesse. Si elle disait oui, Robert serait sauvé, car il ne porterait pas la main sur Ralph… mais alors, ce « oui » scellerait sa destinée : elle serait condamnée pour toujours à vivre avec Ralph, c’était l’ancienne lutte qui recommençait. Si elle disait non, la prendrait-