Page:Weil - Écrits de Londres et dernières lettres, 1957.djvu/110

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de simple croyance. Pour l’Amérique, la guerre est encore récente et amortie par la distance. Mais sous son choc, pour peu qu’elle dure, il est presque certain qu’il se produira de profondes transformations.

L’Europe reste au centre du drame. Du feu jeté sur la terre par le Christ, et qui peut-être était le même que le feu de Prométhée, quelques charbons brûlants étaient restés en Angleterre. Cela a suffi pour empêcher le pire. Mais nous n’avons obtenu qu’un répit. Nous restons perdus si de ces charbons et des étincelles qui crépitent sur le continent il ne sort pas une flamme capable d’allumer l’Europe.

Si nous sommes délivrés seulement par l’argent et les usines de l’Amérique, nous retomberons d’une manière ou d’une autre dans une autre servitude, équivalente à celle que nous subissons. Il ne faut pas oublier que l’Europe n’a pas été subjuguée par des hordes venues d’un autre continent ou de la planète Mars, et qu’il suffirait de chasser. L’Europe souffre d’une maladie interne. Elle a besoin d’une guérison.

Elle ne pourra vivre que si elle s’est délivrée au moins en grande partie elle-même. Elle ne peut heureusement pas avoir recours à une idolâtrie qu’elle opposerait à celle des vainqueurs, parce que des nations asservies ne peuvent pas devenir des idoles. Les pays subjugués ne peuvent opposer au vainqueur qu’une religion.

Si une foi surgissait sur ce continent misérable, la victoire serait rapide, sûre et solide. Cela est évident même sur le plan stratégique. Nos communications se font sur mer, et nous avons à les défendre contre les sous-marins. Les communications ennemies se font parmi des populations opprimées, et deviendraient impossibles si l’incendie d’une véritable foi se propageait sur tout ce territoire.

Mais ni la description des avions de bombardement les plus récents, ni des statistiques de production, ni la