Page:Weil - Écrits de Londres et dernières lettres, 1957.djvu/116

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variées, dont certaines pourraient être toutes nouvelles et inventées au cours de la lutte. Par exemple, si on sait quels sont les quelques hommes indispensables à la marche d’une entreprise, on peut tenter de les approcher l’un après l’autre et essayer de leur persuader soit de fuir, soit de se cacher quelque part à la campagne, soit de feindre une maladie. De même pour les réseaux de voies ferrées. Surtout on doit pouvoir inventer des méthodes qui rendent les ressources de la technique moderne utilisables pour la révolte au même degré qu’elles ont été jusqu’ici utilisées par l’oppression. Par des procédés variés on doit pouvoir faire que la désorganisation s’étende peu à peu sur le territoire occupé par l’ennemi comme une lèpre, comme une maladie mortelle et sans remède, de sorte que la situation de l’Allemagne, en peu de temps, devienne bien pire que si elle était enfermée à l’intérieur de ses propres frontières.

Mais la première condition, c’est que cette action soit parfaitement coordonnée et occupe dans la stratégie générale une place de premier plan.

Non seulement l’énergie enfermée dans l’esprit de révolte serait ainsi pleinement utilisée, mais elle serait incroyablement accrue par cette utilisation même. La propagande par la parole imprimée, radiodiffusée ou transmise de bouche en bouche est une chose essentielle, mais qui n’atteint sa complète efficacité que si elle est combinée avec la propagande par l’action. La parole et l’action, combinées, multiplient réciproquement leur efficacité.

Une telle action coûterait beaucoup de vies infiniment précieuses, mais elle aurait un si grand retentissement qu’elle ferait surgir beaucoup plus de héros qu’elle n’en ferait tomber. Elle aurait sur le pays une influence éducative qui, aussi bien pour la guerre que pour l’après-guerre, compenserait largement les pertes.

L’action clandestine menée actuellement agit cer-