Page:Weil - Lettre à un religieux, 1951.djvu/66

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mais à cause de la sainteté de sa vie et de la beauté de ses paroles.

En ce qui regarde l’authenticité historique des faits qu’on nomme miracles, il n’y a pas de motifs suffisants ni pour l’affirmer, ni pour la nier catégoriquement.

Si on admet cette authenticité, il y a plusieurs manières possibles de concevoir la nature de ces faits.

Il y en a une qui est compatible avec la conception scientifique du monde. Par là elle est préférable. La conception scientifique du monde, bien comprise, ne doit pas être séparée de la vraie foi. Dieu a créé cet univers comme un tissu de causes secondes ; il semble y avoir de l’impiété à supposer des trous dans ce tissu, comme si Dieu ne pouvait parvenir à ses fins sans attenter à sa propre œuvre.

Si on admet de tels trous, il devient scandaleux que Dieu n’en fasse pas pour sauver les innocents du malheur. La résignation au malheur des innocents ne peut surgir dans l’âme que par la contemplation et l’acceptation de la nécessité, laquelle est l’enchaînement rigoureux des causes secondes. Au-