Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/132

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d’imagination (roman, drame, poésie) exige ou suppose la dépense d’un talent original dont l’auteur qui traduit ne doit en saine comptabilité littéraire, nul compte à celui qui est traduit. J’aurai fait ma démonstration palpable et sur le vif, si, au lieu d’invoquer l’Odyssée d’Homère et celle de Voss, que ni vous ni moi n’aurions le temps de parcourir aujourd’hui tout entière ; si même, au lieu d’appeler en témoignage Amyot et Plutarque qui, pour nous conter en grec et en français une seule de leurs Vies, celle des deux Gracques ou celle d’Alcibiade, exigeraient de nous une matinée de loisir, je prends une courte tirade en vers ou mieux encore deux ou trois distiques, et si je fais voir qu’un écrivain supérieur ne saurait traduire en vers même un tout petit distique sans y mettre beaucoup du sien, et de ce qu’il y a dans ce sien de plus sien et de plus particulier. Que dites-vous des deux vers suivants que Damœtas débite dans sa joute poétique avec Ménalque ?

O quoties, et quæ nobis Galatea locuta est !
Partem aliquam, venti, Divum referatis ad aures !


Quelle plus simple et plus fraîche expression peut-on imaginer d’un murmure d’amour, sous les saules, le long du ruisseau courant ? N’est-ce pas qu’il semble au premier abord impossible qu’en traduisant ces