Page:Whitman - Feuilles d’herbe, trad. Bazalgette.djvu/63

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J’ai rentré le bas de mon pantalon dans mes chaussures et suis parti et j’ai eu du bon temps ;
Il aurait fallu que tu fusses des nôtres ce jour-là autour de la marmite au ragoût de poisson.

J’ai vu célébrer en plein air le mariage du trappeur dans l’Extrême-Ouest, la mariée était une Peau-rouge,
Son père et ses amis étaient assis près, jambes croisées et fumant en silence, ils avaient des mocassins aux pieds et de grandes grosses couvertures accrochées à leurs épaules,
Sur un tertre le trappeur était allongé presque entièrement vêtu de peau, le col protégé par sa barbe et ses cheveux luxuriants, et il tenait la main de sa femme,
Elle avait de longs cils, elle était nu-tête, ses cheveux droits et rudes retombaient sur ses membres voluptueux et lui descendaient jusqu’aux pieds.

L’esclave fugitif s’approcha de chez nous et s’arrêta devant la maison,
Je l’entendis remuer au craquement des branchettes du bûcher,
Par la coupure ouverte de la porte de la cuisine je l’aperçus chancelant et à bout de forces,
Et allai vers le tronc d’arbre où il était assis et le fis entrer et le rassurai,

Et apportai de l’eau et remplis un baquet, pour son corps en sueur et ses pieds déchirés,
Et lui donnai une chambre communiquant avec la mienne et lui donnai de gros vêtements propres,
Et me rappelle parfaitement bien ses roulements d’yeux et son allure gauche,