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ADIEU, MA FANTAISIE !

Adieu, ma Fantaisie !
Adieu, chère compagne, chère amie !
Je m’en vais, je ne sais où,
Ni vers quelle aventure, ni si je te reverrai jamais,
Adieu donc, ma Fantaisie.

À présent pour la dernière fois — que je regarde un moment en arrière ;
Le tic-tac de l’horloge se fait en moi plus lent, plus faible,
Sortie, nuit tombante, et bientôt le sourd battement du cœur qui s’arrête.

Longtemps avons-nous vécu, joui, caressé ensemble ;
Délicieux ! — à présent séparation — Adieu, ma Fantaisie.

Pourtant que je ne sois pas trop pressé,
Longtemps, certes, avons-nous vécu, dormi, filtré, vraiment confondus en un,
Alors si nous mourons, nous mourrons ensemble (oui, nous resterons un),
Si nous allons quelque part, nous irons ensemble à la rencontre de ce qui se trouvera,
Peut-être serons-nous plus riches et plus joyeux, et apprendrons-nous quelque chose,
Peut-être est-ce toi à présent qui m’introduis en effet dans les vrais poèmes (qui sait ?)
Peut-être est-ce toi qui ouvres, tournes en effet le bouton mortel — or donc, pour la dernière fois,
Adieu — et salut ! ma Fantaisie.