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ÂME BLANCHE

heureuse, élevée par une femme délicate et élégante, dans les plus subtils raffinements du luxe moderne.

Je n’avais jamais pu souffrir les concombres et je trouvais bien secs le pain rassis, les pommes de terre rôties au four et qu’on assaisonnait seulement d’un peu de sel. Les chaises de la cuisine étaient trop basses pour moi : assise sur l’une d’elles, ma tête seule dépassait la table, et toutes ces circonstances fâcheuses contribuèrent à rendre plus mauvaise encore l’impression que m’avait produite, de prime abord, la maison de mes grands-parents.

Quand elles eurent fini de manger, les trois femmes se signèrent ; Wantje enleva prestement les assiettes sales qu’elle porta dans le lavoir ; la toile cirée fut nettoyée à l’aide d’une éponge, les miettes de pain, soigneusement blayées du carreau ; puis, ces dames s’installèrent avec leur ouvrage devant la table, le plus près possible de la lampe alimentée d’huile à nouveau : ma tante Josine tricotait de fines chaussettes de laine pour le docteur ; ma grand’mère ourlait pour lui des essuie-mains et la vieille Wantje, qui avait conservé des yeux excellents, vint bientôt les rejoindre avec son tambour et ses bobines : elle faisait de la dentelle, ce à quoi je m’intéressai d’abord vivement, malgré l’air rébarbatif de la servante ; celle-ci était de ces personnes de haute stature, restées droites